Sans Patrie

95/ Parce que l’indignation ne vaut que si elle est un préalable à l’action !


Janvier 2011


Mamie CRA CRA a reçu dans sa boîte mail quelques messages dont deux - un d'ici, un de Là-bas - qu'elle a envie de partager, notamment parce qu'ils ne font pas l'unanimité et suscitent la réflexion. Rassurez-vous, rien de grandiloquant ni de compromettant, non. Quoique.


Tout d'abord, les vœux de celui qui n'est qu'un homme, mais un qui se veut porte-parole des morts comme des vivants, des sans voix comme des aphones afin de réveiller ceux qui ont oublié que dans le grand livre de l'existence chacun a voix au chapitre... Et tant pis si on lui reproche d'être pétri de bons sentiments et un peu "court", ça fait bonne mesure avec les silences des uns et les insanités des autres. Le succès de son opuscule nous en dit surtout long sur la mesure du vide qui règne en ce début de XXI ème siècle : il nous rappelle la nécessité de penser, le devoir de s'insurger, la nécessité de résister.

L'aurions-nous donc oublié ?

Le titre lui-même suffit ; une injonction évidente (mais surtout ni permanente ni stérile !) qui en précède d'autres plus subversives moins explicites : et si nous prenions les armes légales qui sont à notre portée ? nos pieds pour taper dans la fourmilière en plus de battre le pavé ; nos voix courtisées mais insuffisamment portées et écoutées ; nos mains pour dégager les obstacles au lieu de les contourner et nous saisir d'outils qui sont à notre disposition - mots, sons et images, autant d'armes de destruction massive du mur d'indifférence -, d'autres les maniant avec brio pour nous emmurer... avec notre consentement tacite.


A vous de vous faire un avis.

Les vœux de résistance de Stéphane Hessel


Mes chers compatriotes,


La première décennie de notre siècle s'achève aujourd'hui sur un échec. Un échec pénible pour la France ; un échec grave pour l'Europe ; un échec inquiétant pour la société mondiale.


Souvenez-vous des objectifs du millénaire pour le développement, proclamés en 2000 par la Conférence mondiale des Nations Unies. On se proposait de diviser par deux en quinze ans le nombre des pauvres dans le monde. A la même date, on entamait une nouvelle négociation pour mettre un terme au conflit vieux de trente ans du Proche Orient – les Palestiniens auraient droit à un État sous deux ans. Échec sur toute la ligne! Une plus équitable répartition entre tous des biens communs essentiels que sont l'eau, l'air la terre et la lumière? Elle a plutôt régressé, avec plus de très riches et plus de très très pauvres que jamais.


Les motifs d'indignation sont donc nombreux. Ce petit livre Indignez-vous! – qui a eu un extraordinaire succès auprès des parents, et plus encore de leurs enfants, auxquels il s'adresse –, c'est quelque chose qui me touche profondément. De quoi faut-il donc que ces jeunes s'indignent aujourd'hui ? Je dirais d'abord de la complicité entre pouvoirs politiques et pouvoirs économiques et financiers. Ceux-ci bien organisés sur le plan mondial pour satisfaire la cupidité et l'avidité de quelques-uns de leurs dirigeants ; ceux-là divisés et incapables de s'entendre pour maîtriser l'économie au bénéfice des peuples, même s'ils ont à leur disposition la première organisation vraiment mondiale de l'histoire, ces Nations Unies auxquelles pourraient être confiées d'un commun accord l'autorité et les forces nécessaires pour porter remède à ce qui va mal.


Au moins nous reste-t-il une conquête démocratique essentielle, résultant de deux siècles de lutte citoyenne. Elle nous permet de revendiquer le droit de choisir pour nous diriger des femmes et des hommes ayant une vision claire et enthousiasmante de ce que la deuxième décennie qui s'ouvre demain peut et doit obtenir. Voilà la tâche que je propose à tous ceux qui m'écoutent. Qu'ils prennent appui sur les auteurs courageux qui se sont exprimés ces derniers mois, sur Susan George et son beau livre Leurs crises, nos solutions, sur Edgar Morin et son dernier tome L'Ethique, sur Claude Alphandéry et ses propositions pour une économie sociale et solidaire. Avec eux, nous savons ce qu'il est possible d'obtenir.


N'attendons pas. Résistons à un président dont les vœux ne sont plus crédibles.


Vivent les citoyens et les citoyennes qui savent résister !


C'est dit.


Elle relaie aussi d'autres mots, adressés à la CEDEAO, qui ne sont pas mâchés non plus, mais offerts en partage. Parce qu' Ici comme Là-bas, l'information est cruciale, difficile à obtenir, souvent partielle et parfois partiale ; parce que tenter de comprendre est plus complexe que détourner la tête, fermer les yeux ou bêler au milieu des loups ; parce que les premières heures de l'année se sont égrenées au rythme de cet appel faisant résonance aux désordres du monde qui s'amplifient de manière sinistre dans la nuit ivoirienne.

C'est transmis.



Enfin, elle se demande quelle bonne fée ira se perdre pour se pencher sur la couveuse du nourrisson dont la maman demandeuse d'asile, est morte en le mettant au monde cette semaine, en Bretagne ?


qui soutiendra son papa encore enfermé dans un CRA à l'autre bout de l'Europe ?

qui veillera sur ses frères alourdis de chagrin réalisant à peine le poids de cette perte fondamentale qui s'ajoute à toutes les précédentes malgré leur si jeune âge ?

qui entendra les cris du jeune Soudanais qu'on tente de renvoyer, sans état d'âme, vers un pays en guerre ?

qui réussira à expliquer que ni le nouveau mur entre la Grèce et la Turquie, ni celui qui devrait protéger Israël des invasions fantasmées de Subsahariens ne sont des solutions aux inégalités du monde (croissantes, de plus en plus évidentes, de moins en moins acceptées, elles poussent les hommes à devenir des passe murailles au risque d'une vie à laquelle personne, même plus eux, n'attache de prix) ?

qui s'interrogera sur les allées et venues au CRA qui se remplit brutalement en fin de semaine, qui se vide au rythme des décisions de justice - inCRAcérant, prolongeant, incarcérant, éloignant, expulsant, faisant réadmettre, remettant dans la rue -, des décisions d'injustice si l'on se réfère à la Déclaration Universelle des droits de l'Homme quelle que soit la langue employée ?

le français, Article 13
1. Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l'intérieur d'un État.
2. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays

l'arabe 13 المادة
1. لكل فرد حق في حرية التنقل وفى اختيار محل إقامته داخل حدود الدولة.
2. لكل فرد حق في مغادرة أي بلد، بما في ذلك بلده، وفى العودة إلى بلده.

le mongol, Арван гуравдугаар зїйл
1. Хэн ё бай улс орны дотор ёєлєєтэй зорёих, оршин суух газраа ёєлєєтэй сонгон авах эрхтэй. 2. Хэн ё бай
аль ё улс орныг, тїїний дотор эх орноо орхин явах, эх орондоо эргэж оёих эрхтэй.

le breton, Mellad trizek (13)
1. Pep den en deus gwir da vont ha dont en e frankiz ha da zibab e annez e diabarzh ur Stad.
2. Pep den en deus gwir da guitaat ne vern pe vro, da guitaat e vro-eñ zoken ha da zont en-dro dezhi.

qui nous réveillera enfin de cette torpeur envahissante, de moins en moins culpabilisante et déchirera ce voile d'impuissance acceptée qui nous sied si bien ?

Qui ou quoi ?

peut-être la jeunesse du Maghreb qui part en lutte "contre la vie chère" ou tout simplement pour une vie digne ;


peut-être les bruissements des peuples du monde qui se lèvent parce qu'ils ne peuvent plus rester assis en un impossible équilibre ni ne veulent vivre couchés ;

peut-être nos enfants qui n'ont pas encore appris à haïr, à mépriser et à tout accepter ;

peut-être ces jeunes ou vieux, qui auront désappris à rester dans les rangs en prenant le risque des chemins de traverse qu'on emprunte parfois seul : ils croisent forcément ceux des autres, par exemple le chemin buissonnier d'un vieil homme digne qui incite à l'indignation comme préalable au mouvement ou les chemins de terre de ceux qui refusent de cautionner, même en se taisant, toutes les indignités

?








09/01/2011
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