Sans Patrie

Une directive européenne ouvre une brèche aux sans-papiers en rétention : une première à Lille

vendredi 14.01.2011, 05:16 - LAKHDAR BELAÏD

Le centre de rétention de Lesquin accueille les migrants en situation irrégulière.  PHOTO ARCHIVES PHILIPPE PAUCHET Le centre de rétention de Lesquin accueille les migrants en situation irrégulière. PHOTO ARCHIVES PHILIPPE PAUCHET

| IMMIGRATION |

Ce week-end, dans un palais de justice de Lille assoupi, l'avocat Olivier Cardon a mis en oeuvre la nouvelle botte des avocats spécialisés dans le droit des étrangers dans leur guerre à fleurets mouchetés (et sans fin) avec l'administration. ...

Dimanche matin, comme il en a l'habitude, Me Cardon tente de contrer une demande formulée par les services préfectoraux : la prolongation de la rétention d'un sans-papiers algérien. Une formalité, a priori... Devant la juge de la détention et de la liberté (JLD), l'avocat dégaine pourtant une nouvelle arme juridique.

Question de monopole

Une directive européenne du 16 décembre 2008 entre en contradiction avec les droits notifiés aux sans-papiers placés en rétention. Les textes français prévoient que l'étranger retenu peut avoir recours au soutien d'une association. En l'occurrence, l'ordre de Malte, seule présente au centre de rétention administrative (CRA) de Lesquin. Mais, dans son article 16, la directive européenne rejette ce qui peut être considéré comme un « monopole ». Or, le texte européen devait être transposé en droit français au plus tard le 24 décembre 2010.
Résultat, dimanche, le client d'Olivier Cardon est libéré. Une première à Lille. La préfecture fait appel. Et, mardi, la cour d'appel de Douai confirme la décision lilloise. Une première en France. La directive concerne également la méthode employée pour communiquer le règlement intérieur du CRA aux étrangers retenus. « En maison d'arrêt, on donne au détenu un document, traduit dans sa langue, précise l'avocat. Au CRA, c'est juste un affichage sur les murs en différentes langues. »
Si le texte européen influe sur les conditions de détention des sans-papiers, il paraît également efficace dans les dossiers d'expulsion. Mercredi, en invoquant l'article 7 de la fameuse directive, Julie Gommeaux, une autre avocate spécialiste de la question, a obtenu l'annulation de plusieurs arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière (APRF) du tribunal administratif de Lille.

Tache d'huile

Encore une décision inédite. « Selon la directive, avant un départ contraint, il faut d'abord proposer un départ volontaire, décrypte Olivier Cardon. C'est le cas avec un autre outil, l'obligation de quitter le territoire français (OQTF). »
Les défenseurs des sans-papiers peuvent se réjouir. Sans, pour autant, se bercer d'illusions. Les méthodes feront tache d'huile, mais les efforts pour combler cette faille juridique ont certainement déjà débuté. •


14/01/2011
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